samedi 23 juin 2007

Bilan en vrac


Je me prépare à aller célébrer l’amour dans la vie de ma plus vieille amie, Yannou… Tout est prêt. Le cadeau. La carte. Le bagage. La tente. Le cœur. C’est Bob qui m’accompagne. À défaut d’être accompagné d’un amoureux qui m’aime, je vais être accompagné d’une « Ostie d’chicks ! » qui m’adore ! Je suis DJ pour une bonne partie de la soirée. Ça va être ROCK !

Les trois dernières fins de semaine, j’ai voyagé. Je suis parti sur la route. En autobus. Exit Montréal. Vers Sherbrooke. Vers New York. Vers Québec. Ça m’a fait un bien fou. J’avais besoin de faire de la route. J’avais besoin d’avoir de la musique dans les oreilles et de voir défiler le paysage pendant des heures… Mes idées se sont éclaircies. Ma vie s’est comme enlignée. Je le savais que j’avais pas besoin de voir un psy. Je le savais que c’était pas ça la solution. Je me connais quand même. J’en ai vu d’autres.

Dans mes oreilles, j’ai beaucoup écouté Nirvana. Comme à 18-19 ans, quand j’avais tous leurs albums. Et je me shoutais du Nirvana dans les tympans à chaque fois que je prenais le bus entre Sherbrooke et Montréal (J’ai fait mon Cégep à Sherbrooke et à cette époque, je revenais aux deux fins de semaine à Montréal pour me saouler avec mes amis de la banlieue.)

I like it - I'm not gonna crack
I miss you - I'm not gonna crack
I love you - I'm not gonna crack
I kill you - I'm not gonna crack


Quand mon appart a brûlé, en 1999, ma collection de Nirvana (que je n’écoutais plus) a disparu en fumée. Dernièrement, je m’étais racheté l’album (vraiment excellent !) « Unplugged in New York » Je me suis gavé de rock ! Chez un marchant de disques de Broocklyn, j’ai racheté « Nevermind » que j’écoute en boucle depuis mon retour des USA.

Come, as you are
As you were
As I want you to be
As a friend, as a friend
As an old ennemy
Take your time, hurry up
Choice is yours, don't be late
Take a rest as a friend as an old memory


Comment expliquer l’effet « catharsis » de la voix de Kurt Cobain ? Ça ressemblait à ce que j’avais en dedans… Un mélange de rage. Un besoin de crier. Un courant électrique qui passe le long de la colonne vertébrale et qui se brise sur les cordes vocales. Y’a des trucs qui nous reste collé à la peau parce qu’on a été là juste au bon moment. Juste au moment où ça s’est passé. « Smells like teen spirit » est sorti l’année de mes 18 ans. Juste au bon moment.

J’ai vécu une grande frustration face aux réactions des gens par rapport à la gestion de la peine. La grande tristesse. C’est assez pathétique de voir à quel point les gens ne supportent pas les débordements. Je suis allé à plusieurs funérailles depuis janvier. Et bien même là, c’est mal vu de « trop pleurer » Criss ! Ton père est mort. Ta blonde est morte !!! Dans la tombe. Trop maquillé ! C’est vraiment la vraie dernière fois que tu vois son corps. Tout s’est fait très vite. Tu es fatigué. À bout ! Et on t’oblige à sortir parce que tu « risques » de trop pleurer. Que ce n’est pas sain. Que ce n’est pas bon. Tu n’es pas assez fort… Et les gens restent de glace. Surtout ne pas montrer qu’une partie de ta vie s’effondre. Que le sol te glisse peut-être plus vite que tu penses sous les pieds… L’ostie de contrôle ! Le monde qui se contrôle tout le temps sont définitivement des freacks ! Ça craque de partout. C’est triste.

Je le sais que ce n’est pas cool quelqu’un qui dit : « Je vois tellement pas le bout que des fois je me dis que je serais mieux mort… » C’est pas cool. Ça fait peur. Mais c’est mieux de le dire. L’exprimer cette peine immense. Cette fatigue incroyable. Parce qu’on a le droit de ressentir ça. La vie est vache souvent. En ostie en plus. Ça se peut pas que ça aille tout le temps bien. Des fois, on crash. L’important, c’est d’avancer, même si on rampe pendant un petit bout. On finit par se relever à un moment donné.

Je le savais que j’avais pas besoin de me faire soigner. Et encore moins d’engourdir ma tristesse avec des pilules ! J’étais fonctionnel. Je ne suis pas contre les anti-dépresseurs, mais ils ne devraient servir qu’à donner un coup de pouce quand tu en as vraiment besoin. Exemple, quand tu t’enfermes dans ta chambre, sous tes couvertes, tu dors 18 heures par jour, tu ne veux plus voir personne et tu ne te présentes plus au travail… Mais ils ne sont pas là pour t’empêcher de ressentir. Comment te débarrasser de ta peine si tu la vies pas ? Je n’ai raté aucune journée d’ouvrage. J’ai raté aucune journée de soleil non plus. J’ai pas refusé de sortir de ma tanière. Je me suis pitché… C’étais gris souvent, mais je fonctionnais…

J’ai cherché en criss comment m’en sortir parce que je dois avouer que ça a été lourd par bout. Je « choke » quand il y a des changements dans ma vie. Je le sais en plus que « tout changement est bon ! » mais c’est le travail de ma vie : Accepter le changement. En plus, je suis hyper impatient. Quand je veux quelque chose, je le veux tout de suite. Alors quand un changement arrive, je voudrais déjà être bien dans du neuf… Sans passer par la période d’adaptation. Mais heureusement, il y a les voyages en autobus. Qui sont écologiques en plus !!!

Je le sais que c’est pas « normal » de tomber si vite en amour. Superman m’a rentré dedans comme un dix roues. Je le sais pas pourquoi ? Coup de foudre pur et dur. J’ai été son « rebond » de son chum d’avant. Et il a été mon tremplin professionnel. Il m’a trouvé ma nouvelle job que J’ADORE !!! Après 3 semaines, je me sens revivre. Et les boss me donnent déjà des responsabilités supplémentaires. Et l’argent rentre… Et je travaille avec le plus beau sourire du monde !

Comment ne pas passer pour fou dans une société qui exige de constamment performer, sans donner l’espace nécessaire ? Je le ressens le surpeuplement. Je me suis fait dire que mes projets étaient bons, que mes idées étaient géniales, que j’étais le candidat idéal, mais sans obtenir les contrats. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a plus d’argent. « V’là 20 ans, v’là 15 ans, même v’là 10 ans, tu serais déjà riche avec le talent que tu as, mais aujourd’hui, on ne peut plus rien te promettre, on ne peut plus rien t’offrir ! »

Comment ne pas capoter aussi quand la madame qui s’occupe de ton dossier au chômage t’appelle pour te demander en quoi consiste ton « travail autonome » Tu expliques que tu es auteur et que tu écris entre 20 et 25 heures par semaine.
- Mais alors vous n’avez pas le droit au chômage, Monsieur.
- Ha bon ? Pourquoi ?
- Parce qu’il faut que vous soyez disponible à travailler à temps plein. Si vous consacrez 20 heures par semaine à écrire, il est évident que vous n’avez pas le temps de travailler 40 heures.
- Mais madame, depuis que je suis officiellement auteur (c’est-à-dire 5-6 ans) je consacre entre 20 et 25 heures par semaine à l’écriture et j’ai toujours travaillé entre 35 et 50 (60-65) heures par semaine.
- Où trouvez-vous le temps pour écrire 25 heures si vous travaillez 50 heures par semaine, Monsieur ?
- Heu… Le matin tôt, le soir tard, et les fins de semaine !
- Ha ! Mais… De toute façon, je ne peux pas accepter ça. Ici, au chômage, si vous nous dites que vous écrivez 20 heures par semaine, on considère que vous devez être payé pour ce travail. Donc que vous n’avez pas besoin de travailler ailleurs.
- Mais je ne suis pas payé pour mes heures d’écriture.
- Vous devriez être payé Monsieur.
- Je sais. Je suis d’accord avec vous. Mais la société étant ce qu’elle est, il n’y a pas d’argent pour les auteurs.
- Alors, il me faut la preuve que vous abandonner votre travail d’écriture dans le but de vous chercher un emploi à temps pleins.
- Mais je ne veux pas abandonner mon travail d’écriture.
- Alors, vous n’aurez pas droit au chômage, Monsieur…
Après ce téléphone, j’ai pleuré de rage. Nirvana à fond ! Ça m’a calmé. Mes conseillés m’ont dit d’écrire ce qu’elle voulait entendre. Qu’au fond, ça avait aucune importance. Mais, ça m’a quand même pris tout mon petit change, comme si je me jetais un mauvais sort, d’écrire « j’abandonne ma carrière d’auteur »… Une question persiste. Si tous les auteurs et les artistes qui sont confrontés au même genre de bureaucratie ne disent pas la vérité, juste dans le but de rentrer dans les petites cases, comment vous voulez que la bureaucratie finisse par s’adapter à notre réalité ?

Je suis allé faire une conférence dans une école d’immersion en Français. Deux classes d’immigrants de tous les horizons. Une quarantaine de Sud Américains, d’Asiatiques, d’Est Européens, d’Africains, de Maghrébins, ayant quitté leur pays, n’ayant pas leurs diplômes de reconnus, et devant apprendre une deuxième (ou troisième) langue. Des adultes déracinés. Complètement courageux. Qui se donnent une chance de repartir à neuf. Ces deux classes travaillaient sur une de mes pièces de théâtre. La prof ne leur avait jamais lu la dernière scène, ils ont dû analyser les personnages et les dialogues et ils ont inventé une fin. Ma conférence consistait à expliquer un peu ma démarche comme auteur et surtout de répondre à leurs questions (car ils en avaient préparé. Ça faisait aussi parti des objectifs du cours.) Tout se passe bien, mais je les sens intimidés. Je ne comprends pas trop pourquoi. Je suis pourtant un auteur assez cool. Mais je crois que juste le titre « d’Auteur » ça impressionne… Comme si c’était quelque chose de génial… Alors que finalement, c’est un travail comme un autre (sauf qu’on est pas payé ! ;)) On est rendu à la période de questions. Ils n’osent pas. Je prends une gorgée d’eau et je m’assois.
- Vous savez, il ne faut pas que vous soyez gêné de me poser des questions. C’est moi qui devrais être gêné d’être devant vous, parce que je vais vous dire le fond de ma pensée… C’est tout un honneur pour moi que vous ayez travaillé ma pièce et d’autant plus un honneur d’être parmi vous. J’ai beaucoup d’admiration pour vous, parce que je sais que ça prends beaucoup de courage d’être ici, faire ce que vous faites à tous les jours pour apprendre le français… Apprendre une autre langue et s’adapter à un autre pays… Quand tu es enfant, on dirait que ça se fait tout seul, mais quand tu es un adulte… Je sais que c’est difficile. Je sais c’est quoi parce que je suis allé vivre en Australie, alors que je parlais à peine l’Anglais… Au début, ça va vite, on se trouve bon. Mais à un moment donné, quand on a environs 50-75 mots de vocabulaire, on atteint un espèce de plateau… On utilise toujours les mêmes mots, on se débrouille, mais on dirait que ça ne rentre plus… Des fois, j’avais le cerveau tellement fatigué de toujours parler en anglais, que le soir je rentrais chez moi et c’était comme si je mettais ma tête à Off. Mes colocs (Australiens) me parlaient et j’entendais juste « blablabla… » Alors, je sais ce que vous vivez et je m’en fous que vos questions soient drôlement bâtis… Ne soyez pas gêné. Je suis sûr que vous êtes tous très bons…»
Du coup, 40 paires de yeux se sont mis à briller… Les questions sont sorties de toute part… Ils en avaient des choses à dire… En Français. Et c’était réellement un honneur d’être avec ces gens.

Enfin la piscine Fullum est ouverte ! J’en ai profité mardi. L’eau était vraiment bonne !

J’ai reçu des bonnes nouvelles et des propositions alléchantes et j’ai enfin réussi à t’exprimer clairement les sentiments qui m’habitent depuis presque dix ans… Et qui sont toujours aussi fort… Nos longues conversations téléphoniques de cette semaine m’ont donné des ailes. Enfin !
Hier, pour tout ça, et aussi parce que je suis vraiment fier de moi, j’ai sabré le mousseux avec Belle Rousse sur sa terrasse. C’était frisquet, mais les bulles étaient bonnes !

Bon, il faut que j’aille me préparer pour la noce.
Bonne fin de semaine à tous!

XXX

5 Commentaires:

Blogger Alcib a ajouté...

Heureux de te retrouver ainsi, Joss. Merci d'être qui tu es et de t'exprimer si naturellement.

Félicitations aux mariés : beaucoup de bonheur, longtemps, longtemps...

11:56 p.m.  
Anonymous Anonyme a ajouté...

Je vais très souvent à la piscine Fullum. On risque de s'y voir donc ;)

4:01 p.m.  
Anonymous Anonyme a ajouté...

Je suis tellement contente que tout se replace tranquillement pour toi.

Je suis contente de voir que tu es capable de faire fi des commentaires négatifs que tu as eu dernièrement et que tu es fort pour te remonter et reconstruire ton monde afin qu'il soit comme tu le souhaites!

Je suis heureuse pour toi de voir que tu as des amis et de la famille qui tiennent très fort à toi et qui sont là pour te supporter quoi qu'il arrive.

Tu es très fort et je suis certaine que la vie et pleines de bonnes choses sont devant toi! Ne baisses surtout pas les bras. Effectivement, rien n'arrive pour rien, mais parfois, c'est difficile à prendre et à accepter. Les changements sont bons, faut-il encore être capables de s'y adapter à notre vitesse.

Profites de ton nouvel emploi, de l'été, des moments de bonheur qui sont devant toi.. nous n'en avons jamais assez lorsque survient les ennuis... vraiment, je te souhaite un été des plus agréable!

Bisous!
Josie
xxx

4:33 p.m.  
Blogger Joss a ajouté...

Merci d'être là, mes indispensables fidèles...
XXX

10:16 p.m.  
Blogger Catherine a ajouté...

Wow.. tu en avais beaucoup à dire et à raconter.. Bravo pour ce texte! Me semble que ça fait longtemps que j'attendais de lire tes paroles.. Pas que j'aime pas les petits billets photos.. mais j'aime toujours lire tes mots..

Je pense comme toi pour ce qui est de la tristesse... Je crois qu'il est beaucoup plus sain de vivre sa peine comme on l'entend plutôt que d'essayer de faire "bonne figure"..

Je t'admire pour ton courrage et ta détermination d'être bien.. lâche pas :o)

9:19 a.m.  

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